Transport à Abidjan : Qui va arrêter le phénomène des « gnambros » ?





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Le ministre des Transports Adama Koné doit jeter un coup d'œil dans le milieu des gnambros



Le sujet est vieux. Il a été soulevé plusieurs fois. Aussi bien dans les milieux des dirigeants, des populations que des transporteurs eux-mêmes. Le phénomène gnambros, ces individus qui s’imposent comme entremetteurs entre transporteurs et clients, dérange et constitue une véritable source d’insécurité pour tous. Malheureusement, malgré les belles paroles, il perdure, au vue et au su de tous. Pourtant, sur le terrain, les gnombros (expression malinké qui signifie voici ma main, une manière de quémander une pièce d'argent à un conducteur pour service rendu) qui se font aussi appeler syndicats, sont un véritable cauchemar pour les populations et les transporteurs.

Le cas d’Abobo est très inquiétant. Du rond-point de la mairie de la commune jusqu’au zoo d'Abidjan, très tôt le matin, on retrouve ces individus pratiquement à tous les 100 ou 200 mètres. Les minicars communément appelés gbakas, qui chargent à la mairie, doivent s’acquitter d’un droit à payer à ces soi-disant syndicats. Et gare à celui qui fera de la réticence. La violence qu’ils utilisent pour entrer en possession de « leur due » est effrayante. Ils usent de tous les moyens non-conventionnels : soit on arrache la clé ou on empêche l’ « apprenti gbaka » de monter dans le véhicule soit ils tabassent carrément le chauffeur. Des conducteurs y ont déjà trouvé la mort. En plus de cette taxe illégale, tout au long du trajet, partout où il fera monter un client dans son véhicule, il devra encore payer. Et ce scénario se poursuivra jusqu’à Adjamé. Idem pour les minicars qui choisissent de rallier Adjamé en passant par l’autoroute.

 

Eviter à tous les prix les gnambros

 

La conséquence immédiate de cette situation, est que les gbakas préfèrent éviter tous les arrêts où il y a des gnambros. Du coup, les pauvres populations qui attendent les véhicules de transport à ces endroits précis, passent des heures sans en avoir. Si on ne veut pas être en retard, il faut quelques fois parcourir de longues distances. Malgré ça, on est exposé à une autre situation, celle de se voir contraint de descendre d’un véhicule que les fameux syndicats ont décidé de décharger. Tout simplement parce que l’apprenti gbaka a refusé de payer leur quote-part de 100 F là où il n’a pris qu’un seul client qui paiera 200 F pour la course.

 

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Dans d’autres communes, c’est le même scénario. À Cocody par exemple, le taxi communal communément appelé wôrô wôrô qui fait son plein de clients à Saint-Jean, doit payer aux gnambros. S’il s’arrête au carrefour La vie pour descendre et prendre un autre passager, il devra encore payer. Il en sera ainsi au carrefour II-Plateaux.

À Yopougon, idem. Il faut payer à SiporexSaint André, etc.

La situation est devenue tellement banale qu’on a l’impression que c’est désormais la norme. Les gnambros ou syndicats sévissent, en rajoutant à l’insécurité, mais personne ne lève le petit doigt pour mettre fin à leurs agissements. Pourtant, ailleurs, des mesures courageuses prises par les autorités locales ont permis de mettre fin à ce fléau. C’est le cas de Koumassi où le maire Cissé Bacongo a réussi à faire disparaître le phénomène.

 

Et pourtant, des solutions existent… mais on ferme les yeux

 

Par l’arrêté municipal 19/07/C.KSSI/SG/DARC/BJ du 14 juin 2019 portant interdiction de toute activité syndicales liée au transport communal et intercommunal de passagers dans la commune de Koumassi, le maire venait ainsi de lancer l’opération anti-gnambros. Naturellement, il y a eu de la résistance qu’il a tuée dans l’œuf avec l’aide de la police nationale et de la police municipale. Des récalcitrants ont même été arrêtés. Mieux, pour pallier toute éventualité, il a fait déguerpir leur lieu de prédilection (juillet 2019), le grand carrefour de Koumassi, et l’a aménagé. Enfin, il a construit, une gare moderne intercommunale avec toutes les commodités qui a été inaugurée le 15 janvier 2020. Transporteurs et clients sont satisfaits. Depuis lors, le phénomène gnambros n’est plus qu’un lointain souvenir.

À Cocody, il y a quelques années, la commune était citée en exemple quant à la lutte contre ce fléau. Le maire de l’époque avait réussi à faire disparaître ces entremetteurs ? Tout le monde avait félicité son action. Malheureusement, ça n’avait duré que quelques mois. Les gnambros étaient revenus en force. Au grand dam des transporteurs et des usagers. Qu’est-ce qui s’était passé entre-temps. Nul ne le sait. À part quelques accusations de chauffeurs de wôrô wôrô sans preuve. Toujours est-il que les syndicats sont revenus et ils exercent en toute quiétude depuis lors.

 

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Pourtant, le ministre des Transports, Amadou Koné, invité de la rédaction du quotidien L’expression, avait reconnu que les gnambros n’ont aucune existence légale. : « Ils n’ont aucune autorisation d’existence délivrée par le ministère des Transports en tant que syndicat ou organisation professionnelle de transport. Donc, aucune existence au ministère des Transports ». Il avait dit avoir remarqué la prolifération de ce genre de syndicats dans le secteur du transport routier qui constitue souvent des troubles dans la société.

Dans cette même veine, il avait soutenu : « Je travaille en étroite collaboration avec mon collègue en charge de la sécurité sur la question de la sécurisation des gares routières. Souvenez-vous que le ministre de la sécurité a même pris souvent des mesures draconiennes, et a fermé certaines gares notamment à Treichville. Il y a même des gens qui sont en prison parce qu’il y a eu des bagarres avec mort d’homme. (…) Mais il faut aller au-delà ». Seulement, depuis cette belle affirmation, rien n’a changé et ces syndicats, qui se résument en de petits groupuscules d’individus, continuent de faire la loi. Au détriment des transporteurs, des populations, des chauffeurs, etc.

 

Modeste KONE

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