Aide militaire européenne à l’Ukraine : une grande menace pour l’Afrique





aide-militaire-europeenne-a-lukraine-une-grande-menace-pour-lafrique


Géographiquement éloigné de la guerre en Ukraine, l’Afrique paie pourtant un lourd tribut du conflit avec la Russie. Sur le front de la sécurité alimentaire et de certaines exportations, le continent accuse déjà le coup. Mais le pire est à venir car l'aide militaire massive de l’OTAN au pays de Volodymir Zelinsky pour faire la guerre contre la Russie constitue une grande menace pour l’Afrique.

Si pour l’heure, la fin de cette guerre demeure une inconnue, une chose est certaine, ces nombreux engins vont semer la mort en Afrique dans un proche avenir. Ils vont devenir du pain béni pour les acteurs des conflits armés, les groupes de djihadistes sur le continent où de nombreux pays sont confrontés à des problèmes de terrorisme ou des tensions sociales.

L’Ukraine va devenir une nouvelle source pour le trafic d’armes. En effet, depuis son indépendance, ce pays a une longue histoire de trafic d’armes. L’Ukraine va hériter de l’Europe, d’immenses stocks d’armes qui seront l’objet de convoitise des trafiquants pour alimenter les crises en Afrique.

Les dysfonctionnements dans les services publics rendront ces stocks attirants pour des hommes d’affaires peu scrupuleux. Denis Jacqmin qui fut chercheur au GRIP révèle que durant les années 1990, de nombreuses armes ukrainiennes se sont ainsi retrouvées notamment aux mains des Taliban pakistanais, mais aussi en République démocratique du Congo, et dans des pays sous embargo tels que la Sierra Leone et le Liberia en Afrique.

Selon cet observateur international pour les missions SMM Ukraine (2014‑2015), la facilité avec laquelle d’importantes quantités d’armes ont été transférées en toute illégalité suppose que des officiels haut-placés, civils et militaires, fermaient les yeux voire participaient directement au trafic d’armes. Mais peu d’enquêtes ont été menées et aucune condamnation n’a eu lieu.

Pourtant, en 1998, une commission d’enquête parlementaire ukrainienne a révélé que, sur la période 1992-1998, l’armée ukrainienne avait perdu la trace de matériels totalisant 32 milliards de dollars sur un total de 89 milliards, ce qui signifie qu’en l’espace de six ans, l’armée ukrainienne a perdu la trace de près d’un tiers de ses équipements, revendus, volés ou « disparus » sans que des documents officiels puissent expliquer cette déperdition colossale.

Risque de dissémination d’armes

Cette situation risque de se produire à nouveau au détriment de l’Afrique. Pour soutenir l’Ukraine dans son combat contre l’intervention russe, les Occidentaux fournissent des milliers d’armes de toute nature à Kiev. Un programme de 40 milliards de dollars d’assistance à la sécurité a été voté par le Sénat américain. Accentuant le risque de dissémination d’armes, comme ce fut le cas de la guerre en Libye.

Ni Nicolas Sarkozy, ni James Cameron, ni Rasmussen, alors patron de l’OTAN, ni Hillary Clinton n’avaient imaginé qu’en déclarant la guerre à Kadhafi, ils enflammeraient le Sahel, puis l’Afrique de l’Ouest pour les décennies suivantes. A l’époque, pourtant, de nombreuses voix s’étaient élevées, notamment celle de Jean Ping, alors président de la Commission de l’Union africaine, afin d’alerter des risques pour l’Afrique et tenter d’empêcher ce conflit. Rien n’y fît.

Plus personne ne nie aujourd’hui qu’en plus de l’instauration du chaos dans le pays de l’ex-Jamahiriya, la guerre en Libye a été l’un des principaux facteurs de la déstabilisation du Sahel. Aujourd’hui, le Mali, le Niger et le Burkina Faso sont devenus le sanctuaire des groupes terroristes. « Le risque est qu’à long terme, certaines de ces armes se retrouvent dans des endroits inattendus et entre les mains d’autres armées et milices», rapportait CNN, relayant des propos d’officiels et experts exprimant leurs inquiétudes.

Une source au sein du renseignement américain expliquait encore: « Nous avons la traçabilité (de ces armes) pendant une courte période, mais une fois entrées dans le brouillard de la guerre, nous en avons presque zéro (…) elles tombent dans un grand trou noir ».

Un diplomate européen a confié à l’IVERIS, que Bruxelles n’a pas plus d’assurance quant au suivi de ses dons létaux que n’en ont les Américains. Il ajoutait qu’une partie de ces matériels serait déjà revendue sur le marché noir et se retrouverait en Bosnie, au Kosovo ou encore en Albanie. Et qu’à partir de cette région, tout peut se retrouver sur n’importe quel théâtre de conflit. De la Libye à l’Afrique de l’Ouest en passant par le Sahel. Cette partie du monde étant depuis la chute de l’URSS, un haut lieu de la contrebande d’armes.

A la lumière de ce qu’il s’est passé en Libye, le Sahel est à nouveau exposé à des risques qui pourraient se propager à certains pays côtiers, comme l’a montré l’attaque djihadiste au Togo, à Bassam en Côte d’Ivoire. La situation est très préoccupante au Mali, au Niger, au Burkina Faso, au Tchad. Les attaques de djihadistes contre les localités et les forces régaliennes sont récurrentes avec leurs lots de nombreux morts. Pour les populations victimes, les mea culpa arrivent toujours trop tard. Face à la livraison massive d’armes létales à l’Ukraine, les dirigeants des Etats africains doivent retenir les leçons de l’histoire.

Source : L’Inter

Partarger cet article

Tags

En lecture en ce moment

Coronavirus: Plus de 300 lits supplémentaires pour renforcer la capacité d’accueil des établissements sanitaires

Burkina Faso : les restes du président Thomas Sankara, réinhumés « courant février » (gouvernement)